Actualités

Accueil > L’effet d’entraînement de l’industrie dans l’emploi

L’effet d’entraînement de l’industrie dans l’emploi

Après une stabilisation en 2017, l’emploi salarié dans le secteur manufacturier a légèrement progressé en France l’an passé (hors intérim). Depuis presque quarante ans, l’érosion continue de l’emploi industriel n’a été interrompue qu’à trois reprises : 1989-1990, 1999-2000 et 2017-2018. Ce constat peut cependant être nuancé : en effet, le mouvement massif d’externalisation nationale d’activités industrielles vers les services a artificiellement accentué le recul observé. Malgré tout, la baisse des effectifs du secteur sur longue période demeure préoccupante, d’autant plus que l’effet d’entrainement de l’emploi industriel sur l’ensemble de l’économie est significatif.

Une externalisation des activités de support

Entre 1980 et 2018, l’emploi manufacturier hors intérim en France est passé de 5,1 à 2,8 millions, soit une chute de 45 % (moins 2.3 millions d’emplois). La totalité des secteurs industriels a enregistré un repli du nombre de salariés sur la période, à l’exception de l’agroalimentaire. Ce résultat, impressionnant par son ampleur, doit toutefois être nuancé. En effet, il est en partie le fruit de modifications profondes du système productif, notamment du recours accru des entreprises industrielles à des prestataires extérieurs pour leurs activités de support : intérim, comptabilité, ressources humaines, R&D, services juridiques, etc. Avec l’aide d’une méthodologie utilisée par l’OFCE, la DG Trésor et la DGE (2005, 2010 et 2017), il est possible d’estimer l’effet de cette externalisation.

Entre 1980 et 2016, le nombre d’emplois externalisés par l’industrie dans les services aux entreprises en France a été quasiment multiplié par deux, passant de 370 000 à plus de 700 000. Après vingt ans de développement quasi ininterrompu, une stabilisation s’est opérée à partir du début des années 2000, suite à l’explosion de la bulle internet et à la récession de 2009. Au final, nous estimons qu’environ 17 % du recul des effectifs manufacturiers depuis 1980 peut être expliqué par un transfert de ces activités de support. Ce constat n’est toutefois pas vérifié pour l’ensemble des sous-secteurs de l’industrie, où de fortes divergences apparaissent quant à l’utilisation à plus ou moins grande échelle de l’externalisation nationale. Ainsi, l’impact de celle-ci a été particulièrement prononcé dans l’industrie pharmaceutique, le raffinage, la fabrication de matériels de transport, l’électronique et la chimie. En revanche, le phénomène a relativement peu concerné l’agroalimentaire, le travail des métaux et la réparation de machines et équipements. Pour la branche de la métallurgie dans son ensemble, la situation est proche de la moyenne puisque sur 1,1 million d’emplois perdus en trente-six ans, près de 170 000 auraient été externalisés vers des entreprises de services, soit 15 %.

Industrie : des emplois décisifs pour l’économie

De par la nature même de son processus de production, l’industrie joue un rôle déterminant dans le développement de l’activité économique (sous-traitance industrielle, transport, commerce, etc.) ce qui génère un nombre significatif d’emplois directs et indirects. Par exemple, l’industrie automobile, en plus de ses effectifs propres, génère des emplois en amont (fournisseurs industriels ou de services) et en aval (concessionnaires, garages, etc.). Cet effet d’entrainement, ou multiplicateur, peut être estimé à l’aide des tableaux entrées-sorties de la comptabilité nationale publiés par l’Insee pour l’année 2015 (dernière disponible). Sans surprise, l’industrie apparaît comme le secteur ayant l’impact le plus fort avec un multiplicateur supérieur à 2, alors qu’il ressort à 1,8 dans la construction et à 1,5 dans les services. Dit autrement, un emploi dans l’industrie implique plus de deux emplois dans les autres branches d’activité.

Au sein des différentes branches industrielles, la situation est toutefois très hétérogène. Ainsi, alors que le multiplicateur s’inscrit à 1,7 dans le textile, il se situe autour de 2 dans la plasturgie, le bois, le travail des métaux ou encore la réparation de machines et atteint voire dépasse 3 dans la chimie, l’agroalimentaire et les matériels de transport.

A retenir :

  • 2.8 millions d’emplois manufacturiers en France en 2018
  • 2.3 millions d’emplois générés dans l’économie par l’emploi industriel
  • 9% : taux de recours à l’intérim dans l’industrie en 2018, soit 300 000 ETP emplois
  • 700 000 emplois externalisés par l’industrie dans les services en 2016, soit 17% des emplois perdus par l’industrie depuis 1980
  • Un emploi dans l’industrie implique plus de deux emplois dans les autres branches d’activité.