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FORTE DÉGRADATION DES COMPTES PUBLICS EN RÉPONSE À LA CRISE

En France, les administrations publiques ont absorbé environ les deux tiers de la perte de revenu national en 2020. Des mesures de soutien inédites ont, il est vrai, été déployées dès le début de la crise sanitaire, lesquelles se prolongeront encore plusieurs semaines compte tenu des nouvelles restrictions appliquées début avril.

Une fois la pandémie derrière nous, une stratégie de désendettement devra être mise en œuvre.

Un boom inédit des dépenses associé à une forte réduction des recettes

Avant la première parution des comptes nationaux des administrations publiques par l’Insee le 26 mars dernier, les statistiques trimestrielles disponibles laissaient anticiper un déficit de l’ordre de 175 milliards d’euros en 2020. Il est en fait ressorti à 211,5 milliards, après 75 milliards en 2019 et une moyenne de 82 milliards par an depuis 2011. C’est pour l’essentiel le besoin de financement de l’État qui s’est creusé, mais, aussi, celui de la Sécurité sociale, laquelle était parvenue à dégager un excédent lors des 3 exercices précédents.

Les dépenses publiques ont grimpé de 74 milliards d’euros l’an dernier, mouvement s’expliquant à hauteur des deux tiers par l’envolée des prestations sociales, elle-même liée à celle des indemnités d’activité partielle. La progression des autres transferts et subventions (fonds de solidarité, exonération de cotisations sociales, aides d’urgence sectorielles) a expliqué 29 % de la hausse d’ensemble et les dépenses de fonctionnement (dont les rémunérations du personnel hospitalier) 13 %. Deux postes ont à l’inverse été orientés à la baisse : l’investissement et, surtout, les charges d’intérêt. Celles-ci ont en effet de nouveau diminué à une cadence à deux chiffres – à savoir – 14,4 % – pour tomber à 33 milliards d’euros.

La contraction des recettes (- 63 milliards) n’est pas loin d’avoir autant pesé sur le déficit que l’augmentation des dépenses. Le produit de la TVA a en effet fondu de près de 13 milliards d’euros compte tenu des contraintes pesant sur la consommation, et, celui des impôts sur les sociétés a cédé près de 4 milliards. De leur côté, les cotisations sociales se sont repliées de 15 milliards, mouvement qui a pour l’essentiel concerné les contributions acquittées par les employeurs (hors exonérations exceptionnelles, comptabilisées en subventions).

Une dérive qui ne date pas d’hier

En proportion du PIB, le déficit public a ainsi triplé en un an, dépassant 9 % en 2020 (en regard, le ratio avait atteint 7,2 % en 2009, exercice durant lequel la récession avait néanmoins été trois fois moindre). Inévitable, la mobilisation des pouvoirs publics dans le contexte que nous connaissons depuis le printemps 2020 a permis de maintenir le pouvoir d’achat des Français. Cette situation exceptionnelle ne doit pas faire oublier l’insuffisante maîtrise des comptes publics, devenue chronique puisqu’ils n’ont jamais été excédentaires depuis 1975. Une lecture plus récente à l’aune des autres économies de la zone euro témoigne de l’atypisme de notre pays : au cours des dernières années, c’est le seul avec l’Espagne et l’Estonie à avoir enregistré un solde primaire négatif (c’est-à-dire hors intérêts de la dette). Sur le seul volet des dépenses, leur poids est plus élevé que celui calculé pour la moyenne des 19 membres pour toutes les grandes fonctions (retraite, enseignement, famille, etc.), sauf pour les services généraux et la sécurité intérieure pour lesquelles il est quasiment similaire.

Une maîtrise impérative de la dette dans les années à venir

La dette publique brute exprimée en euros courants dépasse désormais de 16 % le montant de la richesse nationale, alors qu’elle lui était restée de peu inférieure jusqu’à la crise. Exprimée en net, c’est-à-dire en lui retranchant les dépôts, les crédits et les titres de créances détenus, elle dépasse aussi le PIB pour la première fois.

Cette situation vient davantage conforter les recommandations maintes fois émises par le passé sur le nécessaire désendettement de notre pays, dont celles rendues publiques en mars 2021 par la commission présidée par Jean Arthuis. Au-delà de préconisations techniques (comme celles de rendre contraignantes les règles pluriannuelles et la trajectoire des finances publiques plus crédible), la commission rappelle, plus fondamentalement, les règles qu’il faudra adopter à l’avenir : les dépenses devront augmenter moins que les recettes, c’est-à-dire que la croissance économique potentielle. C’est la condition sine qua non (et de bon sens !) de la soutenabilité des finances publiques, est-il rappelé. À l’heure actuelle, la confiance des créanciers apparaît sans faille puisque la France n’éprouve aucune difficulté pour se financer sur les marchés. Il n’empêche, le niveau exceptionnellement bas des taux d’emprunt – ils sont même négatifs depuis l’été 2020 pour les emprunts d’État à 10 ans – pourrait laisser place à une remontée en liaison avec le retour de l’inflation ou la divergence de la trajectoire des finances publiques avec l’Allemagne notamment. Ce mouvement prendrait certes du temps pour se répercuter sur la charge d’intérêt effectivement payée par l’État (puisque la maturité moyenne de la dette est supérieure à 8 ans) mais, en l’absence de l’application d’une nouvelle politique économique, il renforcerait les craintes liées à la soutenabilité de la dette à long terme.

Chiffres : 

  • + 49 milliards d’€ : variation sur 1 an des prestations sociales versées en 2020
  • – 31,5 milliards d’€ : variation sur 1 an des impôts collectés en 2020
  • 9,2 % : déficit public en proportion du PIB en 2020
  • 7,9 % : déficit public hors intérêts de la dette en proportion du PIB en 2020
  • 2 650 milliards d’€ : dette publique fin 2020
  • 22,7 % : encours de dette détenu par la Banque de France fin 2020
  • 50,1 % : encours de dette détenu par des non résidents fin 2020
  • 8,4 ans : maturité moyenne de la dette fin 2020